Les médecins doivent apprendre à gérer leur stress – Dr Robert Béliveau

Par Fabienne Papin le 8 août 2014 pour L’actualité médicale

En février dernier, l’association Médecins francophones du Canada a invité les médecins à participer à un nouveau colloque sur le bien-être. Après les sessions organisées depuis plusieurs années au Centre ÉPIC avec l’Institut de cardiologie de Montréal, il s’agissait cette fois d’offrir aux médecins un temps de réflexion au Spa Eastman.

Pendant deux jours, les médecins ont bénéficié d’un programme taillé sur mesure. Ils ont notamment pu suivre plusieurs ateliers offerts par le Dr Robert Béliveau. Ce médecin de famille a décidé il y a plusieurs années de délaisser sa pratique traditionnelle pour se consacrer à l’enseignement de méthodes de réduction du stress.

Dans un premier temps, le médecin a invité les participants à réfléchir sur la vie, le changement, et à ce qu’ils attendaient de ce colloque un peu différent de ceux qu’ils suivent habituellement pour maintenir à jour leurs connaissances.

C’est que, selon le Dr Béliveau, si un groupe de professionnels a besoin d’apprendre à gérer son stress, c’est bien celui des médecins. Peu de groupes professionnels s’en imposent autant. La preuve ? Le cours de médecine est tout de même l’un des rares à rendre autant de ses étudiants malades ! « On les soumet à des tensions, à du stress, sans leur donner les habiletés dont ils ont besoin pour prendre soin d’eux », explique-t-il.

Être dans l’instant présent
Pourtant, ces habiletés existent. On peut ainsi commencer par se voir différemment : se voir « comme des ‘‘entraidants’’ plutôt que comme des aidants. Puisque la personne que l’on aide nous aide aussi ».

Après tout, chaque médecin peut à n’importe quel moment devenir patient. Lorsque les médecins prennent conscience de cela, « la qualité de l’intervention change inévitablement ».

À partir d’exemples tirés de sa vie, de celle de maîtres qui ont inspiré sa nouvelle pratique ou encore de celle de patients qu’il accompa-gne aujourd’hui différemment, le Dr Béliveau propose une approche de réduction du stress basée sur la pratique de l’attention.

Mais si la recette semble simple, l’appliquer implique tout un engagement. Adopter de nouvelles habitudes demande non seulement un effort, mais également une remise en cause de nos façons de faire. « Avec la pleine conscience, on ne pense pas en termes de succès, d’échec ou de réussite. Quand on respire, on respire; c’est tout. Quand on médite, on médite; c’est tout », dit le Dr Béliveau.

Être dans l’instant présent est peu mis en valeur dans une société qui se projette beaucoup. Dans nos vies actuelles, non seulement notre travail est très accaparant, mais la société aussi. « On se laisse exciter par les stimuli de la vie, les téléphones, les réseaux sociaux, etc. On aurait plutôt besoin d’outils pour s’apaiser », estime le Dr Béliveau. En ce début de 21e siècle, on a pris un chemin difficile, selon le médecin. « On aime les choses et on utilise les humains. Ce devrait être l’inverse », commente-t-il.

Mais surtout, la vie est compliquée comme ABCD : avec A comme Argent, B comme Burnout, C comme Compétition et D comme Détresse.

Ce qui n’empêche pas que l’alphabet puisse aussi être un guide à décliner pour changer. Car A, c’est aussi Arrêter ou dire Assez; B : Bouger ou reconnaître que l’on a des Besoins; C : Communiquer, Collaborer, Contribuer, Compassion. Et D : Développer, comme dans se développer ou développer ses compétences.

Donc, un nouvel alphabet ou un chemin à prendre qui lui a permis de changer « comme médecin, mais aussi comme papa, conjoint et humain ».

La culture médicale et ses effets sclérosants
Les médecins ont « une culture très conformiste ». Dans l’ancien temps, ils ne juraient que par la saignée, aujourd’hui par les antidépresseurs. Mais, pour le Dr Béliveau, l’autoritarisme empêche l’ouverture, alors que l’humilité permet de faire changer les choses.

« MD ne veut pas dire ‘‘mon dieu’’… J’essaie d’aider mes patients à mieux vivre. Avant j’avais pour objectif de les voir sortir heureux de mon bureau et de les empêcher de mourir », a-t-il témoigné. La médecine elle-même fait partie intégrante de l’équation en ne contribuant pas autant qu’elle le devrait au bien-être des patients. « En prenant en charge, on enlève aux gens leur responsabilité », estime le Dr Béliveau.

Cela fait en sorte que médecin et patient oublient que ce dernier a de l’influence sur sa propre santé et sur ses relations. La médecine donne ainsi trop de place à la médication, alors qu’il existe d’autres façons de gérer le stress. « Les médicaments sont une solution compliquée, mais facile à prendre. La méditation est une solution simple, mais qui demande des efforts », analyse le Dr Béliveau.

Particulièrement adaptée pour contrer les exigences de notre époque, la pratique de la pleine conscience en général, et de la méditation en particulier, ne se contente pas de s’attaquer aux symptômes, elle a le mérite de permettre une guérison profonde. Le médecin ne la considère pas pour autant comme une panacée, mais plutôt comme « un présent » que chacun peut se donner la chance de découvrir s’il le souhaite.

La méditation est une bonne façon de limiter les effets d’un excès de stress. Tout au long du colloque de deux jours, le Dr Béliveau a présenté plusieurs façons de s’y prendre. Les participants ont ainsi pus’initier à la pratique de l’attention à la respiration, mais aussi s’essayer à la marche méditative. Ils ont aussi pu développer leur conscience de leur corps grâce à la pratique du scanning corporel.

Lyne Saint-Roch, professeure de yoga réputée, a quant à elle offert aux participants un atelier de yoga très apprécié. Apparenté pour certains à une forme de méditation, le yoga permet d’être dans l’instant présent et de prendre conscience de sa respiration tout en aidant le corps à s’assouplir et à retrouver son équilibre.

Des exercices pour s’initier en douceur
Pour ceux qui souhaient voir ce que donneraient quelques minutes de méditation, le Dr Béliveau a mis en ligne un exercice de cinq minutes sur YouTube. http://youtu.be/jAYMGc1E4kI

Sur son site, GererMonStress.com, vous trouverez aussi des fichiers audio à télécharger, dont notamment un sur le scanning corporel.

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(Sources: Telegramme.fr, lespetitsdoudous.org)